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Le Saint-Laurent sous la loupe : Les déchets qu’on retrouve sur les berges au Québec

Jimmy Vigneux (chef de mission de la Mission 1000 tonnes et directeur général de Stratégies Saint-Laurent) et Safouane Khamassi (Responsable du programme scientifique chez Stratégies Saint-Laurent)


Chaque année, des tonnes de déchets sont rejetées dans l’environnement. Même jetés à distance des cours d’eau, ces déchets sont entraînés par les eaux de ruissellement lors des pluies et de la fonte des neiges. Ils finissent par se retrouver dans les océans, polluant les écosystèmes marins. Au Québec, le fleuve Saint-Laurent est particulièrement touché par ce phénomène, recevant les déchets provenant de toute la province et se mêlant aux courants marins.

Durant leur parcours et une fois dans l’eau, les déchets se dégradent, se transforment et polluent l’écosystème en impactant à la fois la faune, la flore et les humains. Par exemple, la fragmentation de plastiques, sous l’effet des rayons UV, des vagues et des changements de température, libère des milliers de microplastiques, invisibles à l’œil nu, dans l’environnement. Le problème ne s’arrête pas là. Les microplastiques ont une capacité exceptionnelle à adsorber les polluants présents dans l’eau, tels que les pesticides, les métaux lourds et les produits chimiques industriels. En agissant comme de véritables éponges, ils concentrent ces substances nocives, les rendant ainsi beaucoup plus toxiques pour les organismes vivants.

Les conséquences sont multiples et désastreuses pour la biodiversité. Des plus petits organismes aux plus grands mammifères marins, les microplastiques sont ingérés avec la nourriture, ce qui peut entraîner des blocages intestinaux, une malnutrition et une intoxication aux polluants adsorbés. Les microplastiques et les polluants associés s’accumulent dans la chaîne alimentaire, passant d’un organisme à l’autre. Certains produits chimiques présents dans les plastiques peuvent perturber le système endocrinien des organismes vivants, entraînant des anomalies de développement, des problèmes de reproduction et une augmentation de la sensibilité aux maladies.

L’Expédition Saint-Laurent

« Le Club APRIL Marine, engagé pour la santé de nos cours d’eau, a été un partenaire clé de l’Expédition Saint-Laurent 2024. » Précise Jimmy Vigneux, chef de Mission de la Mission 1000 Tonnes. En collaboration avec la Mission 1000 Tonnes et Stratégies Saint-Laurent, plus de 12 villes québécoises, de Montréal jusqu’à l’île d’Anticosti, se sont mobilisées pour nettoyer les berges du fleuve.

Grâce à cette initiative, plus de 8 tonnes de déchets ont été retirées directement des berges du Saint-Laurent. Un travail de caractérisation rigoureux a permis d’identifier les principaux polluants, offrant ainsi une meilleure compréhension des sources de contamination. Ce sont plus de 31 000 déchets qui ont été triés et pesés, fournissant des données précieuses pour orienter les actions futures et encourager des changements de comportements.

Plastiques à usage unique : les grands gagnants de l’Expédition

Les catégories de déchets les plus couramment observées sur les berges du Saint-Laurent comprennent diverses sources de plastiques à usage unique. À elles seules, les morceaux de plastique durs, les pellicules de plastique et les styromousses représentent plus de 10 000 déchets, constituant ainsi la première catégorie en termes de nombre. En deuxième place, ce sont les mégots de cigarettes qui montent sur le podium : les bénévoles de l’Expédition Saint-Laurent en ont ramassé plus de 5 500. Les troisièmes et quatrièmes places sont occupées par les déchets de restauration rapide (4 500 déchets) et les emballages alimentaires (3 000 déchets). Ces catégories comprennent des bouteilles et bouchons en plastique, des canettes, des tasses, verres et pailles en plastique, et des emballages de chips, biscuits et bonbons.

Ces types de déchets sont répandus dans absolument tous les lieux où l’Expédition Saint-Laurent est passée. D’autres catégories récurrentes observées de façon importante incluent les reçus papier, les sacs en plastique et divers morceaux de ferraille, de bois et des pneus. En raison de leur densité, ces derniers déchets, qui entrent dans les catégories de matériaux de construction et de pièces mécaniques, constituent deux tiers du poids total des déchets ramassés.

Il a été intéressant de constater des différences notables dans les déchets observés selon les régions. Par exemple, en allant plus à l’Est du Québec, on rencontre davantage d’objets issus de la chasse et de la pêche. Les bénévoles ont ramassé plus de 700 douilles de fusil de chasse, et 400 morceaux de cordages, filets, lignes, bouées, pots d’appât et élastiques à homard. Encore une fois, tous ces objets sont majoritairement composés de plastiques.

Les déchets voyagent

Ce qui est frappant, c’est l’omniprésence des déchets, même dans les endroits les plus inattendus et les plus reculés. Bien sûr, les grandes villes comme Montréal produisent plus de déchets plastiques que les petits villages de la Côte-Nord, mais les déchets voyagent avec les courants du Saint-Laurent. Ceci explique en partie pourquoi plus de 3 tonnes de déchets ont été retirées de l’Île d’Anticosti qui a une population permanente de moins de 500 personnes. À titre d’exemple, durant l’Expédition Saint-Laurent des verres à café d’une chaîne de restauration rapide très connue ont été retrouvés sur les plages de l’île et pourtant, cette chaîne de restauration n’a aucune succursale sur l’île. Ce sont les courant qui ont transporté ces déchets jusque sur les berges d’Anticosti tout comme les nombreux déchets retrouvés qui sont liés à la pêche dans l’Estuaire du Saint-Laurent.

L’accumulation de déchets sur les berges nuit non seulement à l’environnement, mais aussi à la beauté de nos paysages. Pour lutter efficacement contre ce fléau, il est essentiel de réduire notre production de déchets et d’adopter des pratiques de gestion des déchets plus responsables. Chacun d’entre nous peut contribuer à cette démarche en adoptant des gestes simples au quotidien, comme trier et recycler nos déchets et ramasser tous les déchets que l’on croise au quotidien, même si ceux-ci ne sont pas les nôtres.

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